Sur le toit de l’Europe

Sur le toit de l’Europe



À l’issue d’un match fou en rebondissement et d'une campagne héroïque, la Roca Team a remporté l’EuroCup vendredi dernier face à Kazan (86-83). Les Roca Boys étaient arrivés en Russie avec le travail bien fait lors du match un à Gaston-Médecin (89-87).

C’est le premier titre européen dans l’armoire à trophée du club rouge et blanc. Le premier d’une peut-être longue série. L’an prochain, l’ASM disputera la plus grande compétition européenne : l’EuroLeague.

Pour l’AS Monaco, trois spécialistes du basket-ball en France, Alexandre Biggerstaff commentateur pour RMC Sport, Arnaud Lecomte journaliste à L’Équipe et Stephen Brun de RMC Sport, analysent la campagne historique de la Roca Team en EuroCup. 

Un sacre historique 

Monaco est le cinquième club issu du championnat de France vainqueur d’une coupe d’Europe, après Limoges, Orthez, Nancy et Nanterre. La performance est historique à l’échelle nationale.

« C’est une bonne chose pour le basket français, depuis 2016 et Strasbourg, on n’avait pas grand-chose à se mettre sous la dent. Le basket européen est compliqué pour la France, d’autres championnats sont bien plus armés » note Stephen Brun.

Arnaud Lecomte relève aussi la performance historique de la Roca Team : « Depuis 25 ans, j’ai vu beaucoup de bonnes équipes, celle-là me plaît beaucoup, elle a un truc en plus. Le parcours de l’ASM est admirable. »

Stephan Brun de RMC Sport constate le « très bon coup de projecteur pour le basket français » grâce au sacre des Roca Boys. « Tout le monde était derrière l’ASM en finale » ajoute Alexandre Biggerstaff.

Il était derrière le micro de RMC Sport pendant ces playoffs, et a remarqué la ferveur des Roca Fans sur les réseaux sociaux. « L’engouement est monté crescendo au fil de la saison. On suivait ça en direct avec Fred Weis. Il y a toujours eu les mêmes fans de l’ASM depuis le début de la saison, on ne peut rien leur enlever, ils ont poussé leur équipe du début à la fin. »

« Monaco a aussi réussi à toucher des gens qui ne sont pas spécialistes du basket, remarque Stephen Brun. Malheureusement le lendemain c’était le 1er mai, férié, donc on n’a pas pu voir Monaco en Une de L’Équipe, même en encart. C’est l’histoire de notre sport (sourire). »

Un quasi-sans-faute en playoffs 

"Pour en arriver à une finale de coupe d’Europe, Monaco a dû se frotter à un « parcours semé d’embûches » note Alexandre Biggerstaff. Il poursuit : « Tout a basculé entre la phase de groupe et le Top 16, on a commencé à se dire “pourquoi pas” ».

La Roca Team avait pourtant mal démarré ses playoffs en s’inclinant 77-76 à Gaston-Médecin contre Buducnost. Dos au mur, les Roca Boys ont arraché la victoire à Ljubljana (64-74) avant de remporter la belle (90-87).

Depuis cette défaite contre Podgorica, Monaco a gagné ses six derniers matches d’EuroCup, chose « extrêmement rare » souligne Arnaud Lecomte.

« Ensuite, ça a déroulé » poursuit Alex Biggerstaff, puisque l’ASM s’est imposé deux fois en demi-finale contre Gran Canaria, avant donc les succès face à Kazan.

Les joueurs de Zvezdan Mitrovic ne devaient recevoir l’équipe russe qu’au match deux. L’ordre des deux matches a été inversé en raison de mesures de quarantaine en France pour les voyageurs étrangers.

« Ça a aidé Monaco. Après leur victoire à Gaston-Médecin au match un, ils avaient deux cartouches en Russie, c’était bien pour la confiance, analyse le journaliste de L’Équipe. Toutes les planètes étaient alignées même si le succès n’est que grâce à eux. »

La Roca Team, un coeur énorme

Ce parcours historique et rare s’est construit grâce à la force collective rouge et blanche. « Cette équipe a énormément de cœur ! Elle n’a jamais lâché, même quand ça n’allait pas très bien les Monégasques sont toujours restés ensemble » reconnaît Stephen Brun.

Arnaud Lecomte soutient que « les Monégasques ont d’énormes qualités mentales et une forte solidarité collective ». Les fans ont apprécié ces vertus des Roca Boys lors des nombreuses fins de matches serrées. Monaco n’a jamais craqué.

« Les fins de matches étaient serrées, mais ils n’ont jamais lâché, c’était exceptionnel » poursuit Alex Biggersatff. Le commentateur partage la notion d’équipe avec du cœur : « Tout pouvait arriver, mais cette équipe de Monaco a montré à chaque fois que c’était elle qui avait le plus de cœur. »

Le game winner de Rob Gray à Gran Canaria ou encore le deux-plus-un de JJ O’Brien pour le titre : les Roca Boys ont été cliniques dans les ultimes secondes de ces matches à haute pression..

Le consultant de RMC Sport est admiratif du collectif monégasque : «C’est un groupe sûr de ses forces, bien hiérarchisé avec Rob Gray et Dee Bost qui ont carte blanche. C’est une vraie équipe qui joue très bien ensemble. »

Arnaud Lecomte partage ce constat d’une équipe avec une hiérarchie très claire : « Chacun était dans son rôle, personne ne s’est planté sur ces playoffs ». Le journaliste de L’Équipe poursuit : « C’est grâce à Zvezdan Mitrovic, il a structuré et hiérarchisé l’effectif. C’est la recette du succès. »

En plus d’un collectif parfaitement rodé, la Roca Team a aussi fait la différence grâce à ses individualités. Entre autres « Mathias Lessort, Rob Gray, mais aussi Rudy Demahis qui défend sur les plus gros noms » énumère Alexandre Biggerstaff.

Les deux premiers noms n’étaient pas prévus dans l’effectif initial du début de saison. C’est grâce au flair toujours avisé des dirigeants pour les bons coups, que leurs signatures ont pu être possibles.

Le journaliste de L’Équipe souligne l’importance de ces deux recrues : « Ils sont les valeurs ajoutées de cette équipe ». Il continue : « La domination et la “mentalité de chiens” apportées par Lessort. Les shoots clutchs de Gray car il n’en n’a pas raté beaucoup, il en a dans le short. C’est l’homme tombé du ciel en octobre. C’est un joueur rare ».

L’Euroligue, l’autre récompense 

Avant même de jouer la finale, la Roca Team était assurée d’être qualifiée en EuroLeague la saison prochaine grâce à la qualification du Zenit Saint-Pétersbourg pour les playoffs de la compétition reine, aux dépens de Valence.

La victoire en EuroCup a seulement légitimé un peu plus, s’il restait des sceptiques, la présence des Roca Boys dans la plus grande compétition européenne. 

« C’est une récompense pour tout le travail accompli » félicite Stephen Brun.

La qualification est arrivée très vite puisque le club rouge et blanc était encore en quatrième division il y a neuf ans. « C’est une nouvelle étape dans la vie de ce club. Tout ça s’est construit aussi grâce aux anciens joueurs passés par le club, quand le club est monté en première division par exemple » souligne Alexandre Biggerstaff.

« L’EuroLeague c’est une autre planète, une autre dimension, prévient Stephen Brun. Mais les supporteurs vont se régaler ! Toutes les stars du basket européen sont sur votre parquet chaque semaine. »

Le club poursuit ainsi son développement à l’international. « C’est formidable pour le club et la Principauté. Le basket c’est le sport numéro deux en Europe, Monaco s’offre une belle vitrine avec la compétition européenne reine » analyse Arnaud Lecomte.

« C’est un deuxième championnat, il va falloir s’armer pour affronter les plus grandes équipes d’Europe. Je ne suis pas inquiet, les dirigeants se sont toujours donné les moyens humains pour réussir » ajoute Alexandre Biggerstaff de RMC Sport.

Stephen Brun partage ce sentiment que « les dirigeants de l’ASM ont toujours bien travaillé, à sentir les bons coups ». Il poursuit : « Et il y en aura des coups à faire avec quelques beaux noms à aller chercher, même si Monaco sera moins armé financièrement. Mais le cadre de vie est aussi un argument qui plaît. »

Dans cette ligue de dix-huit équipes, les huit meilleures sont qualifiées pour les phases finales. Un objectif encore trop haut pour la Roca Team, mais Arnaud Lecomte y croit : « Ils peuvent peut-être aller chercher une qualification en playoffs. C’est très compliqué mais pas impossible. »

Le journaliste de L’Équipe conclut en faisant le parallèle avec la première saison de l’ASVEL en EuroLeague, l’an dernier : « Je pense que l’ASM a l’opportunité d’être acteur de sa campagne, comme l’ASVEL lors de sa première saison, coaché par Mitrovic. Monaco n’a rien à perdre. »

Après cette magnifique parenthèse européenne, la Roca Team sera de retour à la compétition dimanche face à Gravelines-Dunkerque. La suite de la saison en JeepElite pour tenter de chercher un second trophée cette saison.

Hugo Metreau