Yakuba Ouattara : « Beaucoup de choses dépendent de nous... »

Yakuba Ouattara : « Beaucoup de choses dépendent de nous... »


Formé à Chalon sans que l’Élan ne lui donne vraiment sa chance, Yakuba Ouattara (1,92 m, 28 ans dans quelques jours) est passé par la case PRO B (9,2 pts avec Denain en 2014‑15) avant d’éclater avec Monaco dès la saison suivante (12,6 pts et 4,2 rbds). Parti saisir une opportunité en NBA, à l’été 2017, il n’aura malheureusement jamais sa chance, la faute à une blessure l’empêchant de jouer pendant de longs mois... Revenu depuis “at home”, il est l’un des joueurs de base d’une Roca Team à l’effectif pléthorique...


Yakuba, pour commencer, une semaine après votre victoire dans le match au sommet face à l’ASVEL, qui est le plus fort des deux mastodontes de la Jeep® ÉLITE cette saison, Lyon-Villeurbanne ou la Roca Team ?

Franchement, c’est difficile de répondre à cette question. Surtout que ça peut vite chambrer derrière ou passer pour de l’arrogance… 

Plus sérieusement, ligne par ligne, comment compareriez-vous les forces respectives de vos deux équipes ?

Nous sommes assez similaires, je trouve. Franchement, cela se vaut. Peut-être sommes-nous un tout petit peu au-dessus en termes de talent individuel pur. Eux sont peut-être plus complets, plus denses, sur tous les postes. Mais sincèrement, je trouve que les deux équipes sont un peu construites de la même façon, avec des budgets proches et des coachs qui sortent de la même école. Donc forcément, tout ça se vaut... Comme nous, ils sont très physiques, ont un effectif à rallonge dans lequel tous les joueurs peuvent apporter. Nous avons aussi des styles proches, à base d’agressivité, de vitesse en transition offensive. Sur ce match-là, l’ASVEL était aussi amoindrie. Ils n’ont pas été sans doute à leur top. Sur le plan collectif, nous n’avons pas fait non plus notre meilleur match, mais nous avons pu compter sur quelques très belles performances individuelles.

Côté ASM, à l’arrière comme à l’extérieur en général, l’effectif est impressionnant entre Dee Bost, Norris Cole, Anthony Clemmons, Paul Lacombe et vous. Comment vivez-vous vous cette concurrence ?

Très bien, très bien ! On la vit tous assez bien. C’est comme ça que ça se passe dans les grosses écuries où vous avez 11, 12 joueurs tous capables de jouer et d’apporter à l’équipe. Tous les mecs qui sont ici pourraient être des joueurs majeurs dans beaucoup d’autres clubs du championnat. Le fil conducteur, c’est la notion de sacrifice qui est très importante. Ne pas te frustrer et être tout le temps à fond quand tu es sur le terrain pour que, à chaque changement, l’intensité reste constante.

Vous aviez connu Zvezdan Mitrovic lors de votre première expérience monégasque. Aujourd’hui, vous évoluez sous les ordres de Sasa Obradovic. Comment les comparer ?

Ils sont à la fois similaires, car ils sortent de la même école yougoslave, mais avec pas mal de différences quand même... Sasa Obradovic est sans doute beaucoup plus pointilleux. Il est incroyablement rigoureux à chaque entraînement, veut que les systèmes soient toujours exécutés scrupuleusement avec un souci du détail permanent. Tout compte pour lui. Avec Zvezdan, c’était déjà le cas, mais pas tout le temps. Sasa aime bien laisser de la place à un peu de créativité dans le jeu, mais uniquement dans un cadre hyper défini et si tout le reste est appliqué avec précision. Mais je ne vais pas te dire lequel je préfère, bien sûr...  

L’ASM vient de perdre à domicile son premier match du Top 16 d’EuroCup face à Galatasaray. Le club a clairement affiché ses ambitions dans cette compétition qui délivrera deux places pour la prochaine EuroLeague. Le coup vous paraît-il jouable ?

Oui, bien sûr, même si je ne crois pas que nous ayons encore atteint notre vrai potentiel. Pour le moment, certes on peut battre tout le monde, mais on peut aussi se louper et passer à côté comme ça a été le cas contre Galatasaray. Beaucoup de choses dépendent de nous. De l’intensité qu’on est capable de mettre, de la manière dont on entame les rencontres... De notre sérieux en fait ! Par exemple, lors de ce match face aux Turcs, notre jeu collectif n’a clairement pas été au niveau. Nous avons tellement de talent dans cette équipe, que quand nous ne parvenons pas à bien orchestrer ça, c’est un peu du gâchis. Parfois, nous avons encore tendance à nous relâcher, comme au niveau du rebond contre Galatasaray.

Monaco a connu un passage à vide à cheval sur octobre et novembre (2 revers à Boulazac et au Mans). Qu’est-ce qui a changé depuis au sein de l’équipe ?

D’abord, on parvient à jouer plus vite qu’en début de saison et c’est quelque chose qui nous réussit bien. En plus, lors de cette période-là, on avait enchaîné un grand nombre de matchs à l’extérieur, avec des déplacements longs, éprouvants, donc je crois qu’on a eu un trou sur le plan physique. Après, nous n’étions pas totalement au point sur le plan collectif avec encore des choses à mettre en place.  

À titre personnel, vos stats sont quasi identiques sur vos 4 saisons à Monaco. À 28 ans, avez-vous la sensation de progresser encore ?

Oui. Clairement. Je progresse chaque saison même si ça ne se voit pas forcément dans les stats. Vous savez, ce n’est pas si facile de faire mieux, surtout que la densité de l’effectif progresse d’année en année. Donc ton rôle dans l’équipe varie un peu. Il faut toujours t’adapter tout au long de la saison. Alors oui, j’ai l’impression de progresser encore parce que malgré toutes ces situations différentes à chaque fois, il me semble parvenir à maintenir un niveau constant. Plus concrètement, j’ai progressé sur le tir, mais aussi dans mes choix offensifs. Je me connais mieux et j’arrive sans doute mieux à m’adapter en fonction de l’effectif qui m’entoure et de ce que me demande le coach.  

Petit retour sur votre expérience avortée, sur blessure, en NBA (via un contrat two-ways aux Brooklyn Nets, en 2017‑18). Êtes-vous un peu amer de la manière dont les choses se sont passées ? 

Oui, forcément ! j’ai toujours un petit pincement parce que je sais que cela aurait pu se passer de manière différente si je n’avais pas connu cette blessure idiote ! J’aurais pu montrer ce dont je suis capable et je reste persuadé que je peux réussir là-bas. Après, je ne suis pas abattu par ça. La vie continue et voilà ! Je suis heureux d’être à Monaco, tout se passe très bien pour moi. Mais forcément, il y a une pointe de regret...

La NBA est un business. Pensez-vous qu’avoir changé d’agent dans vos tout premiers mois aux USA ait pu jouer contre vous aux Nets ?

Honnêtement, je n’en sais rien... Et je préfère ne pas trop me poser cette question. (Il hésite) Non, franchement, je n’en sais rien...

Cette saison 2017‑18 a été difficile. Qu’est-ce qui vous a fait choisir de revenir à Monaco l’an dernier plutôt que de poursuivre votre carrière à l’étranger ?

Je me sens très bien ici. Je connaissais bien le coach, le staff, le cadre de vie. J’avais envie de me sentir à l’aise pour revenir à mon meilleur niveau au plus vite. Le projet qui m’a été présenté par les dirigeants était intéressant aussi. Monaco, j’adore, j’avoue, alors après un tel coup dur, c’était top de me retrouver dans un cadre que je connaissais parfaitement et que j’apprécie.

Vous avez connu vos premières sélections avec l’équipe de France A pendant les qualifications pour le Mondial 2019. Est-ce que revenir en Bleu voire vous glisser dans la sélection pour les J.O. est un objectif ?

Oui, c’est certain ! C’est un objectif qui me tient à cœur. Porter le maillot de l’équipe de France, c’est un truc très spécial et c’est une immense fierté quand on t’appelle. J’espère bien pouvoir faire partie de l’aventure prochainement. Sur mon poste, il y a beaucoup de concurrence, c’est certain, et c’est le sélectionneur qui a la charge de définir ce dont l’équipe a besoin. Moi, j’essaie de jouer mon jeu, de progresser et de montrer que je peux m’adapter à tous les types de contextes et de situations... Mais j’ai envie de me battre pour ma place, c’est sûr !

Vous allez avoir 28 ans dans quelques jours (le 24 janvier). Comment voyez-vous la suite de votre carrière ? 

L’étranger m’attire encore, c’est certain. Je n’ai tiré un trait sur rien. Il y a deux ans, j’avais pas mal d’opportunités en Europe. À moi de prouver à nouveau ma valeur. Je me sens bien ici, mais je suis aussi curieux de découvrir d’autres contextes. On verra bien ce qui se présentera cet été.

Propos recueillis sur LNB.fr