Monaco attendu au Palais

Monaco attendu au Palais


L’ASM, vainqueur d’un aller ébouriffant, espère confirmer à Pau pour s’éviter une belle périlleuse. Gare à la furia béarnaise…

Un partout, balle au centre... C’est le scénario que la Roca Team espère s’éviter aujourd’hui à Pau, dans un Palais des sports qui en dépit des années (inauguré en 1991) reste probablement la plus belle arène du basket français. Après la folie de l’aller à Gaston-Médecin (99- 97), marqué par le show phénoménal du jeune arrière international de l’Elan, Elie Okobo (44 points, tout près du record absolu en play-off détenu par l’Américain Ron Davis - 45 avec Mulhouse, en 1989 -), la Roca Team se présente aujourd’hui avec une double casquette : celle d’une équipe dominatrice en saison régulière mais qui s’en est tirée au courage et un peu par miracle mercredi à la maison. Du coup, l’Elan Béarnais, apparu surmotivé 
et sans pression au Louis-II, s’est donné des raisons d’y croire. Reste à savoir si le camp béarnais n’a pas ac- cusé le coup d’avoir laissé échapper une aussi grosse occasion en Principauté.

« C’est une vraie série de play-offs, très intense. On devra mieux défendre sur les pick and rolls si on veut atteindre la demi-finale », répète Zvezdan Mitrovic, coach d’une Roca Team toujours privée de son artilleur numéro 1, Gerald Robinson (déchirure aux adducteurs, retour possible pour les demi-finales), mais qui a prouvé de grosses ressources mentales mercredi, à l’image de son leader Paul Lacombe. « On a senti que Monaco nous a craints à l’aller. On a à cœur de faire un match plein et de retourner à Monaco pour disputer une belle », dit Laurent Villa, coach de l’Elan Béarnais. Faut-il le préciser, Okobo va faire l’objet d’une surveillance rapprochée. Si l’adresse de loin reste une donnée incertaine, l’ASM, au pied des Pyrénées, devra mieux verrouiller sa raquette pour éviter que l’euphorie ne gagne à nouveau les rangs de l’Elan. Évidemment, le Palais n’attend que ça pour s’enflammer.
Le 23 a montré la voie

Blessé, Chris Evans, l’ailier américain de la Roca Team, n’aurait pas dû jouer le match aller. Il l’a disputé, pourtant, de toutes ses forces. En grand monsieur.

Victime d’une déchirure au niveau du muscle oblique (au niveau de l’abdomen, côté gauche) à l’entraînement quatre jours plus tôt, le dunkeur fou de la Roca Team était médicalement programmé pour rester sagement sur le banc pour le Game 1 face à l’Elan Béarnais. C’était sans compter sur son opinion personnelle.

Ou plutôt son envie, ou sa foi. Contre l’avis du Doc, donc, et à contre-courant de tous les clichés entourant le carriérisme des sportifs professionnels, Chris Evans a décidé de jouer. Risqué ? Forcément.
Mais finalement moins pesant pour lui que l’idée de rater le premier match crucial des play-offs... « On s’est battu toute l’année pour être premier et ces quarts de finale sont un piège où l’on peut tout perdre. Personne ne veut de ça dans l’équipe », glisse le natif de Chesapeake (Virginie). Il avait promis au staff de ne pas dunker trop fort. Histoire de ne pas jouer sur la corde du mal.

Coach Z touché

Résultat, même diminué dans ses gestes, Evans a marqué 10 points (à 5/8, plus 3 rebonds, 1 passe, 2 interceptions en 21 mn) et claqué un dunk fracassant dans le dernier quart-temps. « Je n’ai pas pris de risque, j’étais sur mon côté droit sur cette action », glisse l’Américain, pas tellement du genre à en rajouter dans les discours…

Une sacrée histoire qui a même touché profondément coach Mitrovic. « Pour moi, le fait majeur de ce match 1, ce n’est pas seulement le record de points du joueur de Pau, Elie Ekobo (44 pts), c’est l’attitude de Chris Evans... Chris a pris la responsabilité de cette décision parce qu’il sentait que l’équipe en avait besoin. Cela mérite le plus grand respect ». Des propos loin d’être anodins. Entre l’entraîneur monténégrin, chantre de la discipline collective, et son feu follet américain, les relations n’ont pas toujours été faciles, surtout au début, quand Chris Evans piaffait d’impatience sur le banc.
« Je n’ai pas toujours reçu l’autorité dont j’aurais eu besoin dans ma jeunesse, disait récemment Chris Evans, doté de qualités exceptionnelles, mais qui n’a jamais eu un ticket en NBA et a dû attendre 27 ans pour avoir sa chance dans une équipe capable de naviguer dans le top européen. Je dois dire que le coach m’a beaucoup apporté, tant au niveau du jeu que de la rigueur ».

« Une saison incroyable »

Entre les deux hommes, au fil de la saison, la confiance s’est instaurée. Comme preuve de non-égoïsme et de sacrifice collectif, Christopher Evans pouvait difficilement faire mieux que lors de ce Game 1... Déjà privée de son top-scoreur Gerald Robinson et de Yak Ouattara, l’ASM s’inquiétait sur la façon de compenser. Le joueur flanqué du numéro 23 a répondu présent. Sans chercher à s’attribuer la tenue du Superman.

« Héros ? Non, pas du tout. J’ai joué parce que je sentais que mon corps me le permettait. Je pouvais gérer sans douleur. On est allé chercher la victoire en équipe, au caractère. On vit une saison incroyable avec ce groupe. C’est ma plus belle expérience. On veut tous aller au bout et décrocher le titre. Mais pour cela, il faudra impérativement mieux défendre que mercredi. Ce sera aussi la clé de ce match retour ».

FRANÇOIS PATURLE, Nice-Matin